JAZZ MAGAZINE    février 2009

 


Michael Mantler „Concertos”
(Disque d'émois)


Bien que ses sources d'inspiration soient plurielles (jazz, improvisation libre, musique écrite de tradition savante, rock), la musique de Michael Mantler n'en demeure pourtant pas moins singulière. Aussi, ses œuvres, parfaitement cohérentes sur le plan stylistique, se révèlent-elles pourtant très diverses dans leur approche, ce qui est la marque des grands. Le plus frappant reste bien sûr cette fusion entre l'écriture et l'improvisation (cf. les partitions consultables sur le site du musicien !). À l'audition, on ne parvient pas précisément à savoir ce que le soliste improvise ou non. Tout l'art réside justement dans cette ambiguïté. Le compositeur demande au soliste soit d'improviser totalement (comme Nick Mason, ancien batteur des Pink Floyd), soit d'interpréter librement la partie écrite, et c'est sans doute Roswell Rudd qui s'accommode le mieux de cette situation. Lorsque les solistes ne sont pas habitués à l'improvisation - ce qui est le cas de Pedro Carneiro et de Majella Stockhausen (fille de Karl-Heinz) - Mantler écrit alors une improvisation simulée. Ainsi, dans le cas du Concerto pour piano, il semble qu'il se soit inspiré de certains traits de Cecil Taylor - d'un résultat étonnant si l'on écoute la musique dans cette perspective. Parmi les réussites, il y a la sublime pièce inaugurale du disque où le maestro en personne donne une véritable leçon de musique (entre sa trompette free, le déphasage rythmique peut-être issu de Ligeti, une répétitivité descendante de Janacek…). Ou encore celle écrite pour Bjarne Roupé (rappelez-vous : la guitare saturée au début de "Aura" avec Miles). Certes, il y a quelques longueurs (comme dans le concerto de Carneiro par exemple) et ce n'est pas que du jazz ; mais on y respire des effluves souvent inédites et, de nos jours, cela n'a pas de prix.


- Ludovic Florin

 
 
 

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